Alain-Dominique Gallizia & Rammellzee
Le premier à me parler de Rammell est Henry Chalfant, son témoin de mariage, photographe de référence, avec sa complice Martha Cooper, du graffiti new-yorkais sur trains des années 80.
Grâce à Henry et quelques amis peintres new-yorkais, je joins Rammellzee et lui propose de participer à un projet en cours : la réalisation d’œuvres pour la « Collection Amour », qui sera exposée au Grand Palais de Paris en 2009.
Ce projet de « recueil » du talent des plus grands tagueurs et graffeurs sur une toile de « battle » de même format et de même thème, séduit ce guerrier des lettres.
En effet, Rammell souhaite la présentation au public et la reconnaissance toujours plus grande par le monde officiel de l’Art de ce courant artistique, exposé dans les galeries américaines dès les années 70 et européennes dans les années 80.
Il vient s’installer, photos et esquisses sous le bras, à la « Ruche » mon atelier de Boulogne-Billancourt ; au fil des jours, se construit une réelle amitié entre nous, italiens d’origine, riche de partage et de complicité. C’est à cette époque qu’il m’affublera du surnom de Crazy Froggy.
Il m’explique, repas arrosés après soirées épiques, une partie de sa philosophie et surtout de son combat, qui deviendra le nôtre, pour l’Art Calligraphique, « issu des moines de Jumièges et de Cluny » et illustré ainsi dans « Tower of apparitors »
Il me parle de la méconnaissance du public pour ce courant artistique de Graffiti élaboré sur toile et peint en atelier, à l’opposé du rapide « Street Art ».
Je lui promets de porter ce mouvement pictural au-devant de la scène internationale et obtiens quelques mois plus tard, grâce au soutien indéfectible du président Yves Saint-Geours, une exposition au Grand Palais.
Il m´y fait la surprise de sa venue, en costume et masqué, en soutien à cette démarche et revient passer quelques jours à l’atelier.
Les liens se resserrent, mais sa maladie le ronge : le teint jaune, il se sent fatigué mais souhaite toujours continuer son combat dans une optique nouvelle de transmission.
Il m’envoie alors quelques-unes de ses plus belles Œuvres d’époque et d’autres plus récentes réalisées pour donner vie à une Collection « Rammellzee » au sein du fonds Gallizia.
Il m’annonce avec émotion la même année, lors de l’un de ses appels réguliers, « être condamné à court terme et souhaiter venir dans mon atelier pour y réaliser sa dernière œuvre, et elle sera pour moi ! ». Quel honneur !
Rammell me charge d’appeler Koor (B-One) et Toxic (C-One), seuls rescapés après la mort d’A-One, pour « peindre ensemble la dernière œuvre du « crew ».
À côté de cette œuvre à trois mains, il finalise « Atomic Note Tag Minus 12% «, le tableau du temps qui s’envole et lui échappe.
Une rémission dans sa maladie, (due à un nouveau diagnostic et à un nouveau traitement), lui permet de peindre la toile « Ransom Note on the Word Edge » où le bras figuré, sorti de tombe, symbolise la reprise du combat.
A sa rechute finale, il m’adresse son dernier mail et « Atomic note Maestro Atmosferic », faire-part de deuil de son personnage, dont le masque-lettre-vaisseau spatial s’envole une dernière fois avec, en guise de flèches, des Tour Eiffel en souvenir du bon temps passé ensemble à Paris.
Aujourd’hui, porté par la confiance et l’amitié de Rammelll, « Crazy Froggy » continue à rassembler, présenter ses œuvres, et porter son combat.
Après avoir contribué à la très belle exposition « Rammellzee, Racing for Thunder » au Red Bull Art de New-York, c’est à Steve Lazarides qu’à été confiée une partie de ma Collection, offerte au public de London Frieze.
35 ans après l’exposition du musée Boymans de Rotterdam, celle de Sydney Janis à New-York et 7 ans après ma première rétrospective au Grimaldi Forum de Monaco, l’Art du Soldat Gothique et l’Histoire de l’Art sont à nouveau en marche…
Merci, Rammell, de nous permettre d’y participer.